Chroniques de l'Université Invisible : les personnages

 Je ne suis pas très physionomiste. Pas du tout, même. Ce qui m'a valu pas mal de moments de grande solitude face à des amis ou des connaissances.

C'était une malédiction qui me frappait aussi pour l'écriture. J'avais beaucoup de mal à mémoriser le visage de chacun de mes personnages. "Mince, à quoi ressemble Mélusine déjà ?! Elle est brune ou châtain ? Cheveux courts ou longs ?" Je dessine très mal et les petits papiers pense-bêtes que je me gribouillais finissaient toujours par s'égarer. Un vrai casse-tête.

Les choses s'arrangèrent grandement le jour où je tombai sur un splendide bouquin (en fait, je découvris plus tard qu'il en existait plusieurs) qui depuis est devenu ma Bible visuelle par excellence : le Artbook du Café Salé. Le Café Salé ou CFSL regroupe toute une communauté de brillants illustrateurs qui travaillent pour la BD, l'édition, les jeux vidéos, la pub, etc... Ils ont décidé de livrer leurs travaux dans ce Artbook qui parait désormais une fois par an (le tome 6 est en préparation) chez Ankama. J'ai trouvé sous la plume de certains d'entre eux une mise en image de mes propres paysages intérieurs. Merci à eux.

Depuis, quand j'ai un travail en préparation, je vais surfer sur le site du CFSL ou je feuillette les artbooks en espérant tomber sur l'image qui me trotte dans la tête. Il peut s'agir aussi bien de paysages que de décors ou de personnages.

Pour exemple, je vous présente Mélusine (sous la plume de Bengal)

On dirait presque qu'elle est en train de lire nos pensées. Le regard est doux et intelligent. Typiquement Mélusine. Bengal a un talent fou, je suis vraiment admirative de son travail.

Voici l'image qui me sert de référence pour Framboise (toujours par Bengal)

Je trouve qu'on retrouve bien le côté brouillon et désordonné de Framboise. L'image montre peu de détail mais elle fonctionne comme un ancrage pour mon cerveau. Il me suffit de la voir pour que ressurgissent tous les menus détails qui composent le personnage.

Là, c'est Tristan (illustration de Gez Fry)

Tristan est sensé avoir les cheveux blancs, c'est vrai. Et je ne l'imagine pas avec des tatouages et une bouteille de whisky à portée de main. Mais les images qui m'inspirent ne sont pas toujours proches de la réalité du roman. Je vous rappelle que les illustrateurs ne me connaissent pas et qu'ils n'ont pas dessiné leur personnages pour moi. Je trouve juste que l'ambiance de cette image et le style du garçon correspondent à ma représentation mentale de Tristan et de son univers d'errance et de petits larcins.

Et pour finir, un illustrateur aux images puissantes et évocatrices. C'est Masana (galerie toujours visible chez Café Salé).

On a l'impression de voir un Penseur en pleine action, non ?

Chroniques de l'Université Invisible : une petite visite de l'île

L'île invisible est idéalement située. Loin du continent, elle est hors de portée des pensées parasites qui pourraient perturber la sérénité des Penseurs. D'autre part, elle garde ses élèves en circuit fermé, s'assurant une absence totale de communication avec l'extérieur.

La Medersa

L’Université est implantée dans une ancienne école coranique. Son architecture est donc résolument arabo-andalouse. Il faut imaginer une succession de patios rafraîchis par une petite fontaine centrale, des zelliges aux murs, du bois sculpté, le chant des oiseaux perchés sur les tuiles vertes des toits. Une visite de Marrakech m'a permis de tomber sur le cœur de l'Université : la Medersa Ben Youssef. Une splendeur architecturale nichée dans la Medina accessible à tous. C'était LE lieu idéal, j'avais l'impression que j'allais croiser d'un instant à l'autre un étudiant en uniforme ou Père ou Vasco le Commandeur.

"Passant une autre porte richement sculptée, ils débouchèrent dans le centre de la Médersa. Ici, le toit de tuiles vertes s’ouvrait pour laisser entrevoir le ciel. Une promenade couverte courait autour de la petite place à l’air libre au milieu de laquelle une nouvelle fontaine, plus imposante que la précédente, faisait miroiter son eau. Des banquettes et des tables basses étaient installées çà et là." (Tristan)

La serre

Autre lieu symbolique sur l'île. C'est un refuge pour Mélusine, un jardin propice à la réflexion et à la détente. Je l'imagine comme un grand dôme de verre peuplé de chants d'oiseaux et de bruits d'eau et noyé dans une certaine moiteur. Il suffit de visiter les serres tropicales de grands jardins des plantes pour se la représenter : de gigantesques feuilles vertes se déploient au-dessus du chemin, des rongeurs se faufilent dans les fougères, des perroquets colorés bavardent ou traversent le ciel vitré à tire d'aile...

Je n'y connais rien en plantes équatoriales, le seul arbre un peu exotique que j'ai jamais possédé était un bananier (un musa quelque chose) et il n'a pas passé le dernier hiver (les bananiers n'ont pas l'air d'aimer la neige). J'avais juste besoin de donner une impression plutôt qu'une description hyper détaillée.

"Quelques oiseaux réveillés par ces soleils artificiels traversèrent à tire d’aile l’immense serre où nous avions trouvé refuge, Mary et moi. De grands arbres dressaient leurs branches au-dessus du banc. L’air était saturé d’humidité et, au loin, le bruissement aquatique d’une fontaine rythmait discrètement le silence. La nature dormait." (Mélusine)

 "Je m’apprêtais à faire demi tour quand je perçus une lumière du coin de l’œil. Il y avait quelqu’un dans le dôme ! Cédant à un accès de curiosité, je m’approchai de la structure et poussai les portes battantes. Aussitôt, une bouffée de chaleur humide m’enveloppa. J’avais l’impression d’entrer dans un sous-bois. Ça sentait la décomposition et l’humus, de grandes feuilles m’environnaient et formaient une voûte végétale au-dessus de ma tête. C’était très beau." (Framboise)

Quelle idée saugrenue avais-je donc dans la tête en créant ce blog ?

C'est vrai ça, pourquoi ce blog ?

Mon premier roman est sorti depuis Novembre 2010, le second est chez l'imprimeur, paré pour Janvier 2012 et Milan Presse m'a réclamé un texte pour ses magazines. Il semblerait donc que des gens me lisent et apprécient. C'est fou, non ? Des gens achètent mon livre ! Des gens qui ne me connaissent pas !

Pour être une dévoreuse de livres bien avant d'être une gratte papier (ou une tape-clavier), je sais qu'on se pose toujours des tas de questions sur les écrivains. Mais qui est-elle ? Quelle est sa vie ? Est-ce qu'elle est vieille, anglaise et boit du thé ? Est-ce qu'elle vit dans un loft en plein coeur de Manhattan (on peut toujours rêver) ?

Est-ce qu'elle fait des dédicaces parfois ?

C'est pour répondre à toutes ces questions et bien d'autres que ce blog a été créé.

Et aussi parce que...

C'est également pour donner une dimension visuelle aux romans. Pour vous montrer à quoi ressemble, dans ma tête, sous la plume d'illustrateurs ou dans le monde réel, l'Université Invisible, le Monde de Féerie ainsi que leurs principaux personnages. Tout ça dans l'optique de vous prouver que la création ne vient jamais du néant mais bien de tout ce que vous pouvez lire, voir ou entendre. Écrire, ce n'est pas magique et, vous aussi, vous en êtes capables.

Et pour ça aussi...

Quand j'aime un roman, un manga, une bande-dessinée, j'ai envie de le partager. C'est certainement l'ancienne libraire qui parle à travers la voix de la nouvelle écrivaine. On ne se débarrasse pas comme ça des anciennes habitudes. Vous aurez donc le droit à mon avis sur le meilleur de mes lectures. Le pire aussi.

Comme si j'allais vous oublier...

Enfin, ce blog est d'abord là pour recueillir vos commentaires, vos coups de cœur ou de gueule et vos encouragements. N'hésitez pas à donner votre avis et à me laisser un petit mot si le cœur vous en dit !